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J’ai ouvert ma boutique pendant la crise (on m’a aidée)

Interview d’Estelle Garnier, gérante de l’épicerie fine « Comtesse Saveurs », premier magasin « Comtesse du Barry » à Luxembourg.

Racontez-nous votre aventure entrepreneuriale

« Comtesse du Barry », est un souvenir d’enfance. Aux fêtes de fin d’année, avec mes parents, nous allions à Paris et j’ai toujours été émerveillée par ces jolies boutiques et leurs produits d’exception… Je suis toujours restée fidèle à la marque « Comtesse du Barry » en fait ! Je me suis appuyée sur cet émerveillement pour effectuer ma reconversion professionnelle. Mais avoir le goût des belles et bonnes choses ne suffit pas. Tenir une épicerie fine au Centre-ville de Luxembourg reste un vrai métier, un vrai challenge. Il faut avoir la valeur du travail bien fait, savoir reconnaître la qualité d’un produit, le respecter, toujours apporter de la nouveauté dans un contexte multiculturel propre au Luxembourg… Mais ce qui est essentiel pour moi, c’est de réellement proposer un service clients de grande qualité.

Comment nyuko vous a aidée à concrétiser votre projet ?

J’ai participé aux Entrepreneurs Days et notamment suivi une présentation de Thibaut de l’équipe de nyuko qui traitait de l’échec et de l’importance de se ménager des temps de repos pour pouvoir rebondir au mieux et avancer dans son projet. Je me suis dit : « Je ne suis pas la seule à ressentir ça ?! Je suis fonceuse mais en tant qu’entrepreneuse, je sais toujours évaluer le facteur risque. Après, entreprendre, c’est aimer l’adrénaline et se donner à fond pour décoincer les situations difficiles et donner vie et sens à son projet. Cela représente bien évidemment une masse de travail qu’il faut arriver à gérer ! ». Je me suis sentie comprise, à ma place.

Ensuite, ma rencontre avec Pelagia m’a permis de poursuivre avec nyuko. Je voulais que tout soit bien ficelé avant de me lancer. Le Business Model Canvas m’a beaucoup aidée. On a peaufiné mon business plan, ce qui a favorisé les échanges avec la banque qui m’a accordé mon prêt, et avec l’aide de la Mutualité du cautionnement. J’ai été encadrée étape par étape lors de rendez-vous réguliers et ça m'a permis d'avancer beaucoup plus vite ! Même pendant le confinement, nyuko est resté en alerte, à mes côtés.

Vous avez réussi à ouvrir votre boutique dans un contexte de crise sanitaire !

J’ai pris en compte les éléments de la crise, les uns après les autres, pour pouvoir avancer et ouvrir le magasin. On a été stoppés net par la crise sanitaire et le premier confinement, décidé à une semaine de l'ouverture initialement prévue. Le projet était déjà très avancé… Je ne pouvais plus faire machine arrière ! La boutique était prête après le déconfinement (le 11 mai 2020) mais sans marchandises puisque mes fournisseurs français étaient bloqués ! Aussi, nous avons dû nous réadapter et trouver un moyen pour communiquer de manière efficace sur notre démarrage et concept. On a donc commencé avec un pack apéritif de neuf produits sélectionnés par nos soins ! Cela a fait un carton ! On s’est retroussé les manches, on a osé et aujourd’hui, plus d’un an et demi après l’ouverture, je me dis que ça en valait bien la peine. Au vu des résultats, nous allons pouvoir renforcer notre équipe à la rentrée et je profite de l’occasion pour lancer un appel à candidature !

Dans mon métier, l’humain est vraiment important. Par exemple, la rencontre avec le Directeur commercial France de « Comtesse du Barry » de l’époque, Philippe Kratz, a énormément aidé à concrétiser mon projet car on s’est tout de suite bien entendus. On parlait le même langage au niveau commercial et une relation de confiance s’est spontanément installée entre nous. On sent très vite si une relation professionnelle est fluide ou non… C’est pareil avec mes fournisseurs, j’établis des collaborations uniquement avec des passionnés qui partagent une certaine éthique et des valeurs.  Par contre, ce qui me surmotive aujourd’hui, ce sont les gens, mes clients.

Sans mon expérience de vingt ans dans la gestion de boutiques au Luxembourg et en France, cette aventure aurait été plus compliquée et n’aurait peut-être même pas vu le jour. A mon tour, je forme des étudiants, que j’embauche pendant les vacances scolaires, parce que je pense que les jeunes ont beaucoup souffert du covid… Je suis également à la recherche d’un apprenti. C’est important de transmettre aux jeunes ce qu’on a soi-même appris pour qu’ils puissent entrer sur le marché du travail avec une belle expérience.

Et en termes de stratégie business… ?

Ma société « Comtesse Saveurs » développe la marque « Comtesse du Barry » au Grand-Duché ainsi que sa distribution sur le Luxembourg. Nous proposons et mettons en avant la qualité et le savoir-faire des produits « Comtesse du Barry » et, en parallèle, on propose d’autres produits complémentaires, sélectionnés de manière stricte par nos soins. Je lance à nouveau un appel pour référencer des produits d’épicerie fine luxembourgeois, en complément aux vins luxembourgeois de qualité que nous proposons déjà.

Complémentaire de l’épicerie de détail, le B2B est un segment très important de mon business plan. On ne s’attendait pas, l’an passé, à avoir une telle demande ! Aussi, nous avons pris en compte cet élément et proposerons dès la rentrée un catalogue spécialement dédié aux entreprises présentant notre offre de cadeaux d’affaires, de coffrets, d’articles de cave et de plats cuisinés individuels pour les bureaux. Le B2B représente une part non négligeable de mon chiffre d’affaires.

Pour le développement de mon entreprise, je suis actuellement le programme « business mentoring » de la House of Entrepreneurship. Durant 18 mois, je bénéfice des conseils d’un mentor ayant une forte expérience dans mon secteur. On fait un point une fois par mois. Comme nyuko m’a aidée au départ, ce programme spécifique m’aide à continuer à développer mon activité et à progresser. Et, au terme de ces 18 mois, c’est moi qui pourrai devenir mentor…

Des challenges, des imprévus, des pistes de développement ?

La digitalisation ! Nous avons tout de suite lancé un site vitrine avec un catalogue de cadeaux d’entreprise mais il a vocation à devenir une réelle boutique en ligne, dès la rentrée. Actuellement, nos clients peuvent retrouver une sélection réduite de nos produits sur le site Letzshop.lu.  On planche actuellement là-dessus pour que notre e-commerce soit en ligne avant la fin de l’année.

On m’a aussi proposé d’ouvrir un popup store mais j’ai évalué le facteur risque comme étant trop élevé actuellement, alors j’ai dû refuser… Peut-être plus tard ?

Derniers conseils ?

Pour résumer, je dirais : bien s’entourer, prendre le maximum d’informations, se protéger, savoir analyser, connaître son business par cœur et être constamment sur le terrain.

Il ne faut pas négliger sa trésorerie quand on débute, jusqu’à l’atteinte du point mort. Sinon, vous risquez d’avoir des difficultés pour faire des commandes de réassort et vous risquez alors d’avoir des manques au sein de votre magasin, qui va nuire à la croissance de votre chiffre d’affaires. Votre magasin doit toujours être bien achalandé, bien rangé et surtout avec un service client exemplaire.

Être accompagnée par des personnes qui comprennent les difficultés entrepreneuriales (solitude, lassitude, fatigue, etc.) soulage énormément. Le soutien de nyuko a été très précieux pour moi à cet égard. C’est important de bien s’entourer ! Personnellement, ça me rassure, ça m’aide à réaliser que je suis dans le vrai. Et avoir différents points de vue permet d’avancer plus vite, même si, au final, c’est moi qui dois prendre les décisions et les assumer. Dans l’entrepreneuriat, être soutenu, c’est vital. Parce qu’il faut être fort moralement… Il faut toujours aller de l’avant. Les indépendants sont courageux. Je respecte énormément mes pairs… Il faut du courage pour aller jusqu’au bout !

Interview " Je me suis lancée" réalisée par Delphine Anzevui

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