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J’ai ouvert mon cabinet de psychologie

Il était une fois dans un pays fort lointain… Ah non ! C’est vraiment ici et aujourd’hui que ça se passe… C’est l’histoire d’Aurore Jurga qui a ouvert son cabinet de psychologie en 2019. On vous la présente ?

En un mot…

Pour toi, être entrepreneur.e, c’est avant tout… La liberté et la passion
L’avantage principal d’être entrepreneur.e ? L’autonomie
L’inconvénient principal d’être entrepreneur.e ? Le risque

Aurore, qu’est-ce que tu fais dans la vie ?

J’aide les personnes à prendre soin de leur santé mentale, avec douceur et professionnalisme. Psychologue, je me suis spécialisée en thérapie cognitivo-émotivo-comportementale, en psychoéducation, aux approches méditatives ainsi qu’à la réalité virtuelle immersive. Cette dernière technique est encore novatrice au Luxembourg. La réalité virtuelle a des effets remarquables, notamment pour traiter les troubles phobogènes, diminuer l’angoisse, le stress, la douleur ainsi qu’à surmonter des états d’épuisement, comme dans le burnout par exemple. Concrètement, ça vous plonge dans un univers filmé en 360 degrés qui trompe votre cerveau. Imaginez par exemple un voyage en montgolfière, c’est une évasion en pleine conscience… Idéal pour mettre de la distance, prendre du recul et se recentrer sur ce qui nous parait comme essentiel…

Ma passion pour la photographie de paysages et les voyages y est probablement pour quelque chose. J’ai besoin de m’enrichir au contact des autres, des lieux, des nouvelles cultures, et de marcher, de m’oxygéner… C’est un équilibre thérapeutique !

Pourquoi avoir choisi le secteur de la psychologie ?

A 15 ans, je rêvais déjà d’ouvrir un jour mon propre cabinet ! Je ne me suis jamais vue faire autre chose. Déjà à l’époque, j’écoutais beaucoup mes ami.e.s, j’étais leur confidente… Cette évidence a été confirmée par mes cours universitaires. C’est tout simplement une passion qui me permet de mettre mes qualités et valeurs au service des autres : la bienveillance, la chaleur humaine et le respect. Libérer la parole et soutenir les gens dans les difficultés sont mes moteurs !

Aujourd’hui, j’accompagne des adultes, des personnes âgées, des personnes en situation de handicap, et aussi les aidant.e.s et professionnel.le.s de santé. Mes patient.e.s m’apprennent énormément et continuellement.

Comment peut-on te trouver ?

J’accueille mes patient.e.s dans mon cabinet à Belair. J’ai choisi ce lieu pour sa facilité d’accès et parce que je m’y suis tout de suite sentie bien. C’est important pour les personnes qui viennent me voir. Je le partage d’ailleurs avec deux autres psychologues, l’une est spécialisée pour les enfants et les adolescents ainsi que leur famille en thérapies brèves, psychoéducatives et à médiations artistiques, et l’autre est psychologue pour les adolescents et adultes en victimologie, en médiations familiales et en thérapie systémique. Nos approches sont complémentaires. L’activité croît progressivement et de façon de stable, on continue d’étendre nos modes d’accompagnement.

On peut aussi trouver mes services sur mon site internet, Doctena et Facebook. Je suis également affiliée à la Société Luxembourgeoise de Psychologie (SLP) où je suis répertoriée.

Le lancement

Après l’obtention de mon diplôme en psychologie en Belgique en 2015, j’ai d’abord travaillé en milieu hospitalier ainsi qu’en milieu de vie et de soins. Arrivée à Luxembourg en 2017, j’ai introduit une demande auprès de l’Enseignement et de la Recherche pour obtenir la reconnaissance du titre de psychologue à Luxembourg. Il a fallu deux ans pour que l’idée murisse et pour débuter la mise en œuvre. J’ai commencé à exercer dans le nord du pays, et puis je me suis rapprochée au fur et à mesure du centre.

Pour quel statut juridique as-tu opté ? Pourquoi ?

Pour le statut d’indépendante. Je n’ai pas eu le choix : à l’heure actuelle à Luxembourg, la fonction de psychologue est considérée comme une activité commerciale alors qu'il s'agit clairement d'une activité paramédicale. A mes yeux, il y a un réel manque de reconnaissance du / de la psychologue et de sa fonction thérapeutique en santé mentale. Les mentalités doivent changer. Comme le mentionne l’OMS (l’Organisation Mondiale de la Santé), la santé n’est pas que physique ou une absence de maladie, elle est aussi psychologique et sociale… Cela recouvre tous les aspects de la condition humaine. Et on le constate de plus en plus. La crise a été un catalyseur. A nous de sensibiliser à la fonction de psy et à la santé mentale en générale !

Au Luxembourg, en tant qu’indépendante, je devrais donc parler de « client.e.s », le terme « patient.e.s » étant réservé aux professionnel.le.s du milieu médical… Pourtant, quand je fais mon travail et m’implique pour accomplir ma mission, je considère mes « client.e.s » comme mes « patient.e.s ».

T’es-tu fait.e accompagné.e dans le lancement de ton activité ?

Oui. D’abord, par le programme Fit4 Entrepreneurship de l’ADEM (ndlr : dorénavant remplacé par le programme StartYourBusiness) et puis par nyuko. Se lancer seul.e, c’est beaucoup plus difficile. On n’a pas tous les tenants et aboutissants... Quelles sont les étapes du parcours entrepreneurial ? Comment se forger ce personnage d’entrepreneur.e ? Comment dépasser ses peurs sur le plan financier ? Obtenir son autorisation d’établissement ? Connaître les critères pour choisir un bon local ? Etc. Ces questions trouvent plus rapidement des réponses quand on est soutenu.e par des professionnel.le.s du secteur…

Comment cela a-t-il fait évoluer le projet ?

Cela m’a permis d’acquérir des compétences pratiques nécessaires à la réussite de mon projet entrepreneurial qui n’avaient pas fait partie de mon parcours universitaire, comme le marketing ou la comptabilité, par exemple.

De plus, ma promotion comptait de nombreux projets différents…  Les formateurs/trices étaient très à l’écoute, ils et elles ont toujours adapté leurs programmes en fonction de nos professions respectives. C’était très instructif ! Et cela a permis de voir émerger des synergies et de l’entraide. Tout le monde a été d’un réel soutien.

Quelles réglementations dois-tu veiller à respecter dans ton secteur d’activité ?

Le code de déontologie propre à la fonction de psychologue et psychothérapeute avant tout : quels sont mes devoirs pour accomplir mon activité de manière adéquate et éthique en tant que psychologue ? Par exemple, si l’on constate qu’une personne est un danger pour elle-même ou pour autrui, nous avons l’obligation de lever le secret professionnel et d’informer les instances compétentes… Dans les autres cas, nous respectons scrupuleusement une politique de confidentialité.

Cette responsabilité est cadrée et présuppose une grande éthique. La Société Luxembourgeoise de Psychologie (SLP) nous tient informé.e.s des évolutions et des règles à connaître. Pour moi, cela se traduit par le fait d’être capable de me remette en question par rapport à une problématique donnée et de me former en continu. Actuellement, je me forme sur la bientraitance dans le milieu professionnel. C’est aussi important de croiser les regards, d’échanger sur ma pratique avec des superviseurs/ses et des confrères et consœurs.

Des conseils concrets à partager d’entrepreneure à entrepreneurs/ses ?

Au niveau de l’organisation, trois règles d’or :

  1. D’abord, c’est mon ou ma patient.e qui décide quand et à quelle fréquence il ou elle souhaite que l’on se voit. Je m’adapte à la personne et à son rythme.
  2. Ensuite, je m’accorde toujours 30 minutes entre chaque consultation pour assurer le suivi administratif et préparer la consultation suivante. J‘ai appris que je ne pouvais pas être efficace 8 heures non-stop car mon travail nécessite une attention soutenue. C’est passionnant mais aussi fatiguant psychologiquement.
  3. Enfin, pas de rigidité inutile ! Je gère ma charge de travail un peu comme j’en ai envie. Il n’y a pas de côté routinier dans mon travail : je connais de longues journées de 9h à 20h30 mais il y a des jours où je commence les consultations à 10h ou 11h… Alors, pour respecter mes propres limites et pouvoir donner le meilleur de moi-même, le jeudi après-midi, c’est mon petit jour de congé et je préserve mes weekends. Au début, j’acceptais les consultations le matin en weekend, mais plus maintenant...

Et sur les volets positionnement et communication ?

L’emplacement du cabinet influe sur vos tarifs mais également sur votre visibilité. Cela vaut donc la peine de faire une étude de marché et de questionner des pairs avant de choisir.

Au début, je consacrais 3 heures par semaine à ma communication. Il était vital de me faire connaître. J’ai bien travaillé mon référencement. Aujourd’hui, je dirais qu’une fois par mois, c’est suffisant… J’apparais de plus en plus en première page des résultats de recherche sur Google. A partir du moment où l’on a construit une bonne visibilité et de la satisfaction client, cela fonctionne, les gens viennent vers vous.

Quelles bonnes pratiques as-tu pu tester et confirmer ?

J’envoie un courrier par voie postale avec ma carte de visite à des médecins, des professionnel.le.s du milieu paramédical (kinésiologues, orthophonistes, etc.) et à des centres axés sur le bien-être. Cette méthode m’a été inspirée par Fit4 Entrepreneurship.

Je construis des relations de confiance, avec patience et bienveillance. Avec mes patient.e.s mais aussi avec mes collègues, des personnes du milieu médical et paramédical, et les personnes que je suis amenée à rencontrer dans le monde de l’entrepreneuriat… Je garde toujours des liens. Je n’hésite pas à prendre des nouvelles. On se rencontre et on échange. Un vrai réseau, ça se construit dans le temps et cette attitude positive participe naturellement au bouche-à-oreille.

« Je sais ce que je vaux et ce sont les personnes qui me le renvoient ! Ça fait beaucoup de bien. »

Comment as-tu défini ton taux horaire ?

Ça a une été une question centrale au démarrage : à combien fixer le prix d’une séance ? J’ai commencé par m’informer auprès de la SLP sur la fourchette de prix existants au Luxembourg : au moment de ma recherche, cela variait entre 70 et 140 euros de l’heure. Cela évolue. Aujourd’hui, le prix uniforme nouvellement fixé par la CNS est de 175 euros pour une heure de consultation, notamment pour les psychothérapeutes, et le tarif moyen des psychologues sont aux alentours des 100 euros de l’heure. Pour choisir où me positionner dans cette fourchette, j’ai fait mon étude marché auprès de psychologues établi.e.s. Là, j’ai appris que les prix varient en fonction de trois critères : la formation du ou de la psychologue, l’emplacement du cabinet et les aspects socio-démographiques des patient.e.s.

Quand on est entrepreneur.e, le risque financier est pesant. A mes débuts, c’était une peur. Aujourd’hui, c’est moins le cas car j’ai envie et me donne les moyens de me sentir responsable.

Communiquer sur ses tarifs

Je communique mes tarifs quand on me le demande, par téléphone et par mail. Parfois, on n’est pas pris.e au sérieux si on n’est pas suffisamment cher.e. Et d’un autre côté, d’autres personnes sont étonnées que ce soit si cher. L’important c’est de connaître ses limites, les poser et les respecter. En tous les cas, j’en informe mes patient.e.s. Il n’y pas de nombre prédéfini de séances. Cela varie en fonction de comment la personne évolue et de ses besoins.

Comment gères-tu l’équilibre entre ta vie professionnelle et ta vie personnelle ?

J’identifie mes « stresseurs » comme on dit en psychologie, c’est-à-dire les facteurs de risque - qui pourraient me tirer vers le bas - dans les différentes bulles de ma vie : professionnelle, personnelle, en lien avec mon corps, mon histoire… Et en parallèle, je relève toutes les ressources à ma disposition : compétences, qualités, entourage, moments à soi, soutien des proches, etc.

Je ne ramène pas chez moi les difficultés de mes patient.e.s. Je me relâche tout simplement… et alors, ma boussole c’est d’écouter mon corps. Il faut parfois prendre le temps de se reposer et de prendre de la distance pour être la meilleure version de soi-même. C’est vraiment important de se connaître et puis d’apprendre à mettre ses atouts en avant. C’est particulièrement vrai quand on est entrepreneur.e.

Si tu n’avais qu’un seul conseil à donner à de futur.e.s entrepreneur.e.s, ce serait…

Écoutez-vous, croyez en vous et ne cessez jamais de vous former dans le domaine que vous aimez par-dessous tout !

 

Interview "Je me suis lancé.e" réalisée par Delphine Anzevui

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